[PORC] Amkha VS [Disney] Zurg - CDR ~ 42M

La faute de frappe

La main tremblotante. L’œil vif, à l’affut. Les sens en éveil. Le neurone surchauffant. Toutes les conditions étaient réunies pour trouver le pseudo optimal.

Hughes-René, vingt-huit printemps et toujours toutes ses dents devait aujourd’hui faire face à un dilemme des plus insolubles. Sa vie allait prendre un tournant inattendu alors que sortait un nouveau serveur de son activité vidéoludique préférée. Planté devant son écran, il était déscolarisé depuis de nombreuses années. Pire, il n’allait plus en cours depuis la fin de ses études. Il avait renoncé à travailler en dehors de ses heures de travail pour se consacrer à ce fléau, le jeu vidéo. Comme lui, de nombreux individus peu recommandables n’hésitent pas à suggérer à leur dulcinée d’attendre un retour de raid pour s’adonner au coït mensuel. Le monde est en émoi.

Alors que ce fameux nouveau serveur devait arborer la dénomination fleurie et pittoresque de Nusakan, ou Nankebab pour certains intimes, il fallait faire mieux. Mieux que cette sonorité ridicule, cette association de lettres disgracieuse, aléatoire, incohérente. Seul le premier N était à sa place, c’est dire. Non, décidément, il fallait à tout prix éviter cet écueil, cette facilité qui lui tendait la main en lui soufflant de s’appeler Monkey D. Luffy, Dark123 ou Jean-Michel Crapaud.

Choisir un pseudo adéquat pour gagner le respect de ses futurs rivaux représente un enjeu majeur dans l’existence d’un être humain à l’heure de la prégnance des internets. Pour en devenir le boss final, il faut adopter un nom qui fasse frissonner d’angoisse ses rares alliés comme ses nombreux ennemis ou autres vassaux en puissance. Hughes-René réfléchissait, mobilisait ses connaissances enfouies depuis des lustres à la recherche des plus belles archives de la badassitude. Il se remémorait ses plus intenses expériences vidéoludiques, d’Adibou à GTA. Il se fit même la réflexion que Marine Malice n’était sans doute pas une idée particulièrement judicieuse pour inspirer la crainte, malgré toute la finesse dont pouvait faire preuve ce mignon petit poisson jaune.

Puis soudain, ce fut l’éclair de génie. Sarah Kerrigan, la patronne des Zergs dans l’univers de StarCraft. Elle tuait tout le monde avec un rire trop méchant et une voix rauque, c’était parfait. Quoique. Non, en fait, pas tant que ça. C’était une femme, d’abord. Bon, elle ne ressemblait plus tellement à une femme mais quand même, aux dernières nouvelles, elle manquait d’une certaine preuve de virilité. Non, définitivement, il fallait trouver mieux.

Mais, après tout, les Zergs, ils étaient très méchants, eux aussi. Ils faisaient des bruits un peu dégueulasses et avaient de grandes dents menaçantes. Et puis, ça sonnait bien, « Zerg », c’était punchy, crade, punk. Ça semait la mort et la destruction, ce genre de réjouissances. Parfait, voilà qui conviendrait tout à fait !

Plein d’enthousiasme et l’esprit empli d’images où la badassitude dominait, Hughes-Michel se rua sur son clavier pour taper fièrement le nom qui l’accompagnerait dans sa nouvelle aventure. Il cliqua sur entrée d’un coup de doigt herculéen, et jeta un œil conquérant à sa nouvelle appellation.

« Bordel ! ».